Le chef d’état-major des armées Pierre de Villiers, responsable de l’emploi des forces françaises et commandant des opérations militaires, a présenté aujourd’hui sa démission à Emmanuel Macron après avoir affiché son désaccord au sujet du budget de la Défense. C’est la première fois de l’histoire de la Ve République qu’un chef d’état-major des armées démissionne. Le général François Lecointre, jusque-là chef du cabinet militaire du Premier ministre, a été nommé en Conseil des ministres pour le remplacer.
Réduction des dépenses de 850 millions d’euros
Pierre de Villiers avait exprimé la semaine dernière son désaccord avec le plan d’économies de 4,5 milliards d’euros sur le budget de l’État et le « train de vie des ministères » annoncé le 11 juillet par le gouvernement. Le ministre de l’Action et des Comptes publics Gérald Darmanin précisait que le ministère des Armées devrait respecter le budget voté par le Parlement en décembre et donc réduire ses dépenses de 850 millions d’euros pour faire face au surcoût des opérations extérieures de la France, d’habitude assumé collectivement par tous les ministères.
Désaccord ouvert avec le président de la République
Le lendemain de cette annonce, le chef d’état-major des armées avait fait part de ses critiques à Emmanuel Macron, lors du Conseil de défense, et rappelé l’engagement du président de la République d’augmenter le budget de la Défense à 2 % du PIB d’ici 2025. Puis, devant la commission de défense de l’Assemblée nationale réunie lors d’une audition à huis clos, il avait réitéré son mécontentement et mis sa démission en jeu, selon des témoignages recueillis par Le Monde et Les Échos.
Recadrage par Emmanuel Macron
Le 13 juillet, Emmanuel Macron, en déplacement au ministère des Armées pour saluer les troupes qui allaient défiler le lendemain sur les Champs-Élysées, avait déclaré : « Je considère qu’il n’est pas digne d’étaler certains débats sur la place publique », avant d’ajouter : « Je suis votre chef. » Le président de la République avait précisé dimanche dans le JDD : « Si quelque chose oppose le chef d’état-major au président de la République, le chef d’état-major change. »
La liberté de parole face au Parlement en question
Le recadrage d’Emmanuel Macron a suscité de nombreuses réactions parmi les parlementaires, devant lesquels Pierre de Villiers avait exprimé ses critiques. Interrogé par Le Monde, Olivier Faure, président du groupe Nouvelle gauche à l’Assemblée nationale, a regretté que cette crise « appelle à l’autocensure » et déclaré : « Cela veut dire que la parole ne peut pas être libre devant la représentation nationale alors que le Parlement doit justement contrôler l’action du gouvernement. »