Entre 14 000 manifestants, selon la police, et 50 000, selon la mairie de Varsovie, détenue par l’opposition au gouvernement, se sont réunis hier soir devant le palais présidentiel dans la capitale polonaise. Les manifestants réclamaient au président Andrzej Duda d’opposer son veto à plusieurs réformes votées depuis la semaine dernière par le Parlement, visant à renforcer le contrôle du parti au pouvoir sur le système judiciaire. Ils ont dénoncé une atteinte à la démocratie de la part du parti conservateur Droit et justice (PiS) qui dirige la Pologne depuis 2015 et est majoritaire dans les deux chambres du Parlement.
Trois réformes judiciaires en cours
Le 12 juillet, le Parlement a adopté une loi permettant aux députés et sénateurs de choisir les membres du Conseil national de la magistrature et une autre instaurant la nomination des présidents de tribunal par le ministre de la Justice. Hier, la Diète, l’une des deux chambres du Parlement, a voté une troisième loi portant sur la Cour suprême du pays (équivalent de la Cour de cassation française), dont les membres seront révoqués à l’exception de ceux désignés par le président. Le Sénat doit se prononcer aujourd’hui. Le président Andrzej Duda, membre du PiS, n’a pas encore ratifié les deux premières lois.
Mise en garde de l’Union européenne
Le vote intervenu hier s’est déroulé en dépit des mises en garde de l’Union européenne. La Commission européenne avait sommé la Pologne mercredi de « suspendre » ses réformes judiciaires, qui « accroissent considérablement les menaces sur l’État de droit » et présentent des « risques pour l’indépendance de la justice » dans le pays. En janvier 2016, la Commission européenne avait ouvert une enquête préliminaire sur la situation de l’État de droit en Pologne, puis avait formulé six mois plus tard des recommandations que les autorités polonaises n’ont pas suivies.
Procédure de sanction possible
« Nous sommes désormais très proches de déclencher l’article 7 du traité de l’UE », a averti le vice-président de la Commission, Frans Timmermans. Cet article peut faire perdre ses droits à un pays membre de l’UE, dont le droit de vote au Conseil européen. Déclenché sur proposition de la Commission européenne, du Parlement européen ou d’au moins un tiers des pays membres, il doit donner lieu à un accord à l’unanimité des autres pays membres avant le déclenchement de la procédure. Le ministre des Affaires étrangères hongrois a déclaré hier que son pays soutenait la Pologne. L’article 7 n’a jamais été activé jusqu’ici, mais le Parlement européen a adopté une résolution le 17 mai à l’encontre de la Hongrie pour « grave détérioration de l’État de droit ».
Réformes controversées
Le parti Droit et justice avait déjà mis en œuvre plusieurs réformes ayant suscité des inquiétudes au niveau européen. En novembre 2015, le Parlement polonais avait approuvé une loi permettant au ministre du Trésor de nommer et révoquer, à tout moment et sans justification, les dirigeants des médias publics. Puis les parlementaires ont adopté en décembre une réforme du Tribunal constitutionnel, chargé de vérifier la conformité des lois, limitant son pouvoir de contrôle. En mai 2016, 240 000 personnes s’étaient rassemblées à Varsovie pour défendre la démocratie et la place de la Pologne en Europe.
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