Le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire a annoncé cet après-midi une nationalisation des chantiers navals de STX France à Saint-Nazaire. L’État français, qui dispose de 33 % des parts dans le groupe, avait jusqu’à demain pour exercer son droit de préemption lui donnant la priorité sur le rachat des parts restantes des chantiers, à hauteur de 80 millions d’euros. Mis en vente en octobre, les chantiers, d’où est sorti en 2016 le plus grand paquebot du monde, Harmony of the Seas, seraient autrement revenus au groupe public de construction navale italien Fincantieri, le seul à avoir fait une offre. Bruno Le Maire a précisé que cette nationalisation était « temporaire » et visait à permettre la poursuite des négociations avec l’Italie.
Des garanties à obtenir
L’exécutif français a choisi de nationaliser l’entreprise pour « défendre les intérêts stratégiques de la France » en matière d’emploi et de savoir-faire. « Les chantiers navals de Saint-Nazaire n’ont pas vocation à rester sous le contrôle de l’État », a répété Bruno Le Maire. Mais la France cherche à obtenir du groupe italien l’assurance que les emplois (actuellement au nombre de 2 600) seront maintenus sur le territoire en cas de « retournement de conjoncture », même si le carnet de commandes garantit actuellement une activité jusqu’en 2026.
Accord de principe précédent
Un accord de principe sur la reprise des chantiers de Saint-Nazaire par Fincantieri avait pourtant été signé mi-avril à Paris, dans lequel le précédent gouvernement français avait déjà obtenu plusieurs garanties. Fincantieri ne devait reprendre que 48 % du capital, tandis que 7 % des parts seraient revenues à une fondation bancaire privée italienne. L’entreprise s’engageait à rester minoritaire au moins huit ans et à ne pas supprimer d’emplois pendant cinq ans « à conditions économiques inchangées ». L’État français, lui, conservait ses 33 % et faisait entrer au capital le constructeur militaire public DCNS à hauteur de 12 %.
Solution à 50-50 refusée
La passation de pouvoir entre François Hollande et Emmanuel Macron a changé la donne. L’ancien ministre de l’Économie devenu président de la République a annoncé fin mai qu’il souhaitait revenir sur l’accord de principe avec Fincantieri et proposé une solution à 50-50 afin d’équilibrer les intérêts italiens et français, tout en laissant la direction au groupe italien. Emmanuel Macron avait justifié la proposition de cette « nouvelle structure actionnariale » par la nécessité de « garantir la pérennité des emplois » et de « protéger l’indépendance et la souveraineté stratégique » de la France. Fincantieri a refusé cette proposition hier.
Un chantier naval français depuis 150 ans
Le premier chantier naval a ouvert à Saint-Nazaire au début des années 1860. En 1955, les chantiers présents dans la ville ont fusionné pour former les Chantiers de l’Atlantique, devenus une filiale du groupe de construction et d’énergie français Alstom en 1984. En 2006, l’entreprise a cédé les chantiers, alors en difficulté économique, au groupe norvégien Aker Yards. Le constructeur naval sud-coréen STX Shipbuilding a acquis les chantiers en 2008, tout en accordant une minorité de blocage à l’État français. Placé en redressement judiciaire par la justice coréenne en 2016, le groupe STX a mis en vente les chantiers de Saint-Nazaire en octobre.