Le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif a démissionné aujourd’hui, contraint par un arrêt de la Cour suprême de son pays qui a prononcé sa « disqualification » en tant que député au Parlement. Cette décision de justice découle de son implication dans une enquête sur des faits de corruption, révélés l’an dernier par les « Panama Papers », une enquête journalistique sur un vaste système d’évasion fiscale. Il lui est reproché d’avoir caché des sociétés et des biens immobiliers détenus par ses enfants via des sociétés enregistrées dans des paradis fiscaux.
D’autres démissions
D’autres personnalités politiques ont également été contraintes à la démission après les révélations des « Panama Papers ». C’est le cas du Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson, qui a quitté son poste en avril 2016, quelques jours après la publication des documents dans lesquels son nom et celui de son épouse étaient associés à une société située dans les îles Vierges britanniques. Le ministre espagnol de l’Industrie José Manuel Soria a également démissionné peu après les révélations. Parmi les chefs d’État et de gouvernement cités se trouvaient également le roi Salmane d’Arabie saoudite, le président argentin Mauricio Macri et le président ukrainien Petro Porochenko.
Révélation d’un vaste système d’évasion fiscale
Les « Panama Papers » ont été dévoilés en avril 2016, mettant en avant un système d’évasion fiscale à partir des archives du cabinet d’avocat panaméen Mossack Fonseca, spécialisé dans la domiciliation de sociétés offshore, des sociétés-écrans souvent utilisées pour dissimuler des activités ou des fonds. Il s’agissait de la plus grosse fuite d’informations exploitée par des médias : au total, 11,5 millions de fichiers ont été exploités par 109 rédactions, dont Le Monde en France, réunies au sein du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ).
Plus de 150 investigations
L’ICIJ relevait en décembre que, depuis ses révélations, plus de 150 investigations avaient été lancées dans 79 pays, visant plus de 6 500 particuliers et entreprises. En France, le parquet national financier a ouvert en avril 2016 une enquête pour « blanchiment de fraudes fiscales aggravées » et le ministère de l’Économie et des Finances a lancé en novembre des contrôles fiscaux envers 560 contribuables cités dans les « Panama Papers ». Le 10 juillet, l’industriel français Gérard Autajon, dont le nom apparaissait dans les documents panaméens, a été condamné à un an de prison avec sursis et deux millions d’euros d’amende par le tribunal de grande instance de Paris pour avoir caché plus de 21 millions d’euros au fisc.
Davantage de contrôles
Le scandale des « Panama Papers » a amené plusieurs États et organisations à revoir leurs pratiques pour contrôler l’évasion fiscale. Le Panama s’est engagé à partager de manière automatique à partir de 2018 ses informations fiscales avec les autres États, selon les normes de l’OCDE, une organisation qui regroupe les 34 pays les plus industrialisés du monde. L’Union européenne et le G20, qui avaient annoncé l’élaboration d’une liste noire des paradis fiscaux non coopératifs, n’ont cependant toujours pas fait aboutir ces démarches. En France, la loi Sapin 2 a introduit en décembre des mesures visant à plus de transparence en matière de fiscalité et la création d’une agence anticorruption.