Donald Trump a annoncé la semaine dernière que les États-Unis reconnaissaient officiellement Jérusalem comme la capitale d’Israël. Cette annonce a déclenché une vive opposition de la part des Palestiniens, de l’Union européenne et de la plupart des pays arabes. Pourquoi les Israéliens et les Palestiniens considèrent-ils la ville comme leur capitale ? Quelle est la position de la plupart des autres pays concernant Jérusalem ? Que préconise la « solution à deux États », qui vise à résoudre le conflit israélo-palestinien ?
À quelle période se réfère Israël pour revendiquer Jérusalem comme sa capitale ?
Selon la Bible, David, roi d’Israël, conquiert Jérusalem au Xe siècle avant J.-C. et en fait la capitale de son royaume. Quelques années plus tard, il charge son fils Salomon d’y édifier un temple pour en faire le centre spirituel de la religion juive. Au début du VIe siècle avant J.-C., le temple est détruit après la prise de la ville par l’armée du royaume de Babylone. Il est reconstruit. Jérusalem n’est plus que la capitale d’une province successivement dominée par les Perses, les Grecs et les Romains. Le temple de Jérusalem est définitivement détruit lorsque les légions romaines rasent la ville en 70 de notre ère pour écraser une révolte. Les juifs se voient alors interdire l’accès à la ville.
Pourquoi Jérusalem est-elle appelée la ville « trois fois sainte » ?
Jérusalem est une ville sainte pour le judaïsme, le christianisme et l’islam. Pour les juifs, Jérusalem est la capitale de la « Terre promise » aux Hébreux par Dieu à Moïse et abrite le mur des Lamentations, dernier vestige du temple détruit par les Romains. Pour les chrétiens, Jérusalem est le lieu de la crucifixion et de la résurrection de Jésus. On y trouve le tombeau du Christ, selon la tradition chrétienne. Pour les musulmans, Jérusalem est le troisième lieu saint de l’islam après La Mecque et Médine. C’est d’ici que Mahomet a selon eux entamé le « miraj », un voyage nocturne dans les cieux où il rencontra Dieu. Chrétiens et musulmans se sont disputé la ville durant tout le Moyen Âge.
Qu’avait prévu l’ONU pour Jérusalem lors de la création d’Israël en 1947 ?
La Palestine, sous domination britannique depuis la chute de l’Empire ottoman en 1918, est séparée en deux en 1947 par un plan de partage décidé par l’ONU. Le territoire est réparti entre juifs et Arabes, Jérusalem devenant une ville administrée par les Nations unies. Les deux camps ne respectent pas l’accord. Entre 1948 et 1949, Israël s’empare militairement de Jérusalem-Ouest, tandis que la Jordanie prend possession de la Cisjordanie et conquiert Jérusalem-Est. En 1967, à l’occasion de la guerre des Six Jours, Israël repousse la Jordanie dans ses frontières et annexe Jérusalem-Est ainsi que le reste du territoire palestinien. Depuis, l’ONU considère Jérusalem-Est comme un territoire occupé.
Qu’est-ce que « la solution à deux États » ?
Soutenue par une majorité de pays, l’Organisation de libération de la Palestine réclame en 1988 la création d’un État coexistant avec celui d’Israël, alors que les Palestiniens refusaient jusque-là d’entériner la création de l’État hébreu. Dans cette solution à deux États, le territoire palestinien correspondrait à la Cisjordanie, à la bande de Gaza et à Jérusalem-Est. « Cette solution a été entérinée en 1993 par les accords israélo-palestiniens d’Oslo », explique à Brief.me Élisabeth Marteu, chercheuse spécialiste du Proche-Orient à l’Institut international des études stratégiques. L’assassinat en 1995 de Yitzhak Rabin, le Premier ministre d’Israël à l’origine de ces accords de paix, « va empêcher ce processus d’aller à son terme », ajoute-t-elle. « Mais dans l’esprit de la solution à deux États, Jérusalem a vocation à être séparée en deux. »
Comment est organisée la ville de Jérusalem ?
Jérusalem compte aujourd’hui près de 900 000 habitants. Le Jerusalem Institute, un institut indépendant créé par la municipalité, dénombre 528 000 juifs et 323 000 Arabes. La partie ouest est presque exclusivement peuplée de juifs. Elle accueille le centre administratif d’Israël, dont le Parlement, les ministères et la Cour suprême. La partie est, où vivent la quasi-totalité des Arabes et qui englobe la vieille ville, ne comptait que très peu de juifs jusqu’en 1967. Aujourd’hui, 211 000 juifs y vivent, résultat d’une politique de peuplement (construction d’habitations pour les juifs sur le territoire palestinien) menée par Israël.
Que change la décision des États-Unis ?
En 1980, Israël inscrit dans sa Constitution que Jérusalem est sa capitale « une et indivisible », ce qui n’a jamais été reconnu par l’ONU. Les ambassades sont toutes établies à Tel-Aviv, tandis que l’Autorité palestinienne, créée après la signature des accords d’Oslo, en septembre 1993, pour gérer les territoires palestiniens, continue à revendiquer Jérusalem-Est comme sa capitale. La décision de Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et d’y déménager l’ambassade américaine est donc une première. « Les États-Unis, qui font depuis longtemps office de médiateur dans le conflit israélo-palestinien, vont avoir du mal à encore tenir ce rôle après cette décision », analyse Élisabeth Marteu.
Comment les autres pays ont-ils réagi à l’annonce de Donald Trump ?
L’Organisation de coopération islamique, une structure regroupant 57 pays musulmans, a appelé mercredi tous les pays à reconnaître Jérusalem-Est comme capitale d’un État palestinien, en réponse à la décision de Donald Trump. L’Union européenne a déclaré qu’elle soutenait toujours une « solution à deux États » avec « Jérusalem comme capitale des deux ». Emmanuel Macron a condamné la décision américaine, « contraire au droit international » selon lui. La Russie, qui avait reconnu Jérusalem-Ouest comme capitale d’Israël en avril dans le cadre d’une solution à deux États, s’est dite « inquiète » de cette décision qui « n’aide en rien » à résoudre le problème du Proche-Orient.