Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a affirmé jeudi que la situation sécuritaire se détériorait dans le Donbass, une région de l’est de l’Ukraine, où s’affrontent l’armée ukrainienne et des séparatistes pro-russes, et a rapporté que 26 soldats ukrainiens ont été tués depuis le début de l’année. Il avait dénoncé la semaine dernière une « augmentation de la présence de troupes russes à la frontière » avec son pays, accusant la Russie de vouloir « créer une atmosphère de menace ». Le conflit ukrainien est né en 2014 de dissensions profondes entre les régions du pays.
L’Ukraine est un État indépendant depuis la chute de l’URSS en 1991. Ses régions n’ont pas connu le même développement politique et économique pendant l’ère soviétique : l’Ouest a été intégré à l’URSS lors de la Seconde Guerre mondiale, après avoir été sous diverses dominations (polonaise, autrichienne, etc.), alors que le reste du pays l’a été dès 1922. La Crimée, une péninsule au Sud, a été transférée de la Russie à l’Ukraine en 1954. L’Est et le Sud ont partagé plusieurs siècles d’histoire avec l’empire russe, puis l’Union soviétique. Ces régions concentrent les grandes industries héritées de l’URSS, tandis que l’Ouest est moins développé. « C’est un pays divisé dans sa perception de l’histoire du XXe siècle, entre lecture héroïque du passé soviétique et vision d’une URSS répressive », soulignent les chercheuses Ioulia Shukan et Anna Colin Lebedev dans une revue scientifique de 2018. Elles expliquent que « les acteurs politiques ont repris ces clivages », entre des partis tournés vers la russophonie et d’autres attachés à la construction de la nation ukrainienne.
En novembre 2004, le Premier ministre Viktor Ianoukovytch, soutenu par la Russie, est déclaré vainqueur de l’élection présidentielle. L’annonce des résultats déclenche un mouvement de protestation baptisé « Révolution orange », de la couleur de l’opposition europhile menée par le candidat Viktor Iouchtchenko, qui dénonce des fraudes. Pendant plusieurs jours, des dizaines de milliers de personnes manifestent dans le centre et l’ouest du pays et bloquent les accès aux principaux bâtiments administratifs à Kiev, la capitale, pour protester contre les résultats. La Cour suprême ukrainienne, la plus haute instance judiciaire, invalide début décembre les résultats du second tour et ordonne la tenue d’un nouveau second tour, qui consacre la victoire de Viktor Iouchtchenko le 26 décembre. Pendant son mandat, de 2005 à 2010, Viktor Iouchtchenko affiche comme objectifs l’adhésion de l’Ukraine à l’UE et à l’Otan, une alliance militaire de pays européens et nord-américains.
Après plusieurs années de négociations, l’Ukraine, dirigée par Viktor Ianoukovytch depuis son élection en 2010, refuse finalement en novembre 2013 de signer le Partenariat oriental, un accord d’association politique et économique entre l’UE et plusieurs pays d’Europe de l’Est, au profit d’une coopération renforcée avec la Russie. Des dizaines de milliers de personnes manifestent à Kiev contre cette décision et contre la corruption du pouvoir. Le mouvement, baptisé « EuroMaïdan », est sévèrement réprimé, conduisant à de violents affrontements. En février 2014, le Parlement destitue le président Viktor Ianoukovytch. Des groupes armés pro-russes, qui ne reconnaissent pas le gouvernement par intérim pro-européen, prennent le pouvoir en Crimée, soutenus militairement par les forces russes. Un référendum entérine en mars 2014 le rattachement de la Crimée à la Russie. Une insurrection armée pro-russe se développe également dans les deux provinces du Donbass, une région de l’Est, où des séparatistes revendiquent l’indépendance. Elle conduit à une guerre civile avec l’armée ukrainienne.
En février 2015, la Russie, l’Ukraine ainsi que des représentants des séparatistes du Donbass signent les accords de Minsk, après une médiation de la France et de l’Allemagne. Ces accords prévoient la mise en œuvre d’un cessez-le-feu dans certaines zones du Donbass, le retrait des armes lourdes pour la création d’une zone tampon ou encore la libération de prisonniers. Toutefois, aucun des engagements n’est complètement mis en œuvre, selon un rapport de septembre 2015 du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, qui précise alors que près de 8 000 personnes ont péri depuis le début du conflit dans l’est de l’Ukraine. Les hostilités dans le Donbass sont « alimentées par la présence et l’afflux continu de combattants étrangers, d’armes sophistiquées et de munitions depuis la Russie », souligne le rapport. L’UE a pris une série de sanctions diplomatiques et économiques à l’encontre de la Russie depuis 2014 « en réponse à l’annexion illégale de la Crimée et à la déstabilisation délibérée de l’Ukraine ».
Le président russe, Vladimir Poutine, inaugure en mai 2018 le pont de Crimée, qui relie la péninsule ukrainienne annexée à la Russie, dans le détroit de Kertch (voir la carte). L’Ukraine dénonce une « tentative visant à légitimer l’annexion » de la Crimée. L’Ukraine, tout comme les pays occidentaux et l’Assemblée générale de l’ONU, n’a jamais reconnu le rattachement en 2014 de la Crimée à la Russie. Le pont de Crimée permet à la Russie de contrôler de facto le détroit de Kertch et la mer d’Azov, qui ont le statut d’eaux intérieures partagées entre l’Ukraine et la Russie depuis un accord bilatéral de 2003. Sur cette mer quasi fermée, l’Ukraine compte un important port pour son commerce, celui de Marioupol. En novembre 2018, la marine russe intercepte trois navires ukrainiens qui tentaient de franchir le détroit, les accusant d’être entrés illégalement dans les eaux russes, et fait prisonnier leurs équipages. Les marins ukrainiens ne sont libérés qu’en septembre 2019 lors d’un échange de prisonniers entre la Russie et l’Ukraine.
L’élection du comédien Volodymyr Zelensky à la présidence de l’Ukraine en avril 2019 a été suivie d’une période de détente dans le conflit, caractérisée par une reprise du dialogue avec la Russie. Volodymyr Zelensky « a suscité des espoirs, car sa rhétorique tranchait avec celle, guerrière, de son prédécesseur », explique à Brief.me Arnaud Dubien, chercheur et directeur de l’Observatoire franco-russe, un centre de réflexion. Pour autant, « les choses ne sont pas allées très loin, car les accords de Minsk ne sont pas favorables à l’Ukraine », qui espère toujours recouvrer sa souveraineté dans le Donbass, ajoute-t-il. Depuis début 2021, Volodymyr Zelensky a finalement « adopté une rhétorique nationaliste et guerrière » et les manoeuvres militaires russes de ces derniers jours à la frontière avec l’Ukraine visent « à faire comprendre sans équivoque que Moscou n’acceptera aucune évolution du statu quo militaire dans le Donbass » ni « la perte de ses canaux d’influence en Ukraine », selon Arnaud Dubien.
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