Un jeune homme blanc a tué samedi dernier 10 personnes noires dans un supermarché de Buffalo, dans l’État de New York, aux États-Unis. Le shérif du comté d’Érié a dénoncé « un crime motivé par la haine raciale ». L’assaillant s’était revendiqué sur les réseaux sociaux du suprémacisme blanc, une idéologie raciste consistant à prôner la supériorité de la « race blanche » sur les autres. Cette idéologie s’est appuyée sur des travaux prétendument scientifiques du XIXe siècle et a mené à de nombreux actes de violence, en particulier des tueries de masse ces dernières années.
Les premières classifications des êtres humains en races apparaissent au XVIIIe siècle, en particulier avec les travaux du naturaliste suédois Carl von Linné. « Au cours du XIXe siècle, les savants s’appuient sur l’anatomie comparée et les méthodes anthropométriques » pour « établir la proximité physique de certaines “races”, notamment celle des “Nègres”, avec les singes », écrivait Marylène Patou-Mathis, alors vice-présidente du conseil scientifique du Muséum national d’Histoire naturelle, dans une revue scientifique publiée en 2013. L’écrivain et homme politique français Arthur de Gobineau publie en 1853 un « Essai sur l’inégalité des races humaines » dans lequel il clame que « toute civilisation découle de la race blanche, qu’aucune ne peut exister sans le concours de cette race ». Au XIXe siècle, aux États-Unis, à une époque où subsistait l’esclavage, puis avec la politique de ségrégation raciale qui suivit, « le suprémacisme blanc bénéficiait d’un large soutien politique, comme dans les régimes coloniaux européens contemporains », écrit l’encylopédie Britannica.
Un sénateur démocrate du Mississippi, Theodore Bilbo, publie en 1947 un livre dans lequel il s’inquiète d’un risque de disparition de l’Amérique blanche. « Si les races blanche et noire continuent à vivre ensemble, elles finiront par fusionner et les deux races seront détruites », écrit-il. « Une Amérique blanche ou une Amérique bâtarde, vous devez choisir ! », lance-t-il à ses lecteurs. La crainte d’un « changement de peuple et de civilisation » se retrouve dans deux ouvrages publiés en 2010 et 2011, dans lesquels l’écrivain français Renaud Camus affirme qu’un « grand remplacement » est à l’œuvre, conséquence de ce qu’il qualifie de « submersion migratoire » des pays du Nord par des populations issues de pays du Sud. Ce phénomène est selon lui dû aux « remplacistes », des élites mondiales qu’il accuse de promouvoir ce remplacement dans un but « financier, économique, industriel », pour « que tout soit échangeable » et que les humains soient « réduits au statut de produit », selon ses propos dans une interview accordée à Sud Radio en mars 2022.
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