Que s’est-il passé en Irak ?
Les partisans du chef religieux chiite irakien Moqtada al-Sadr ont commencé, à l’appel de ce dernier, à se retirer aujourd’hui de la zone verte, à Bagdad, la capitale de l’Irak. Ce secteur ultra-sécurisé accueille les institutions du pays et des ambassades. Les partisans sadristes y avaient envahi hier un bâtiment du gouvernement en signe de mécontentement après que Moqtada al-Sadr a annoncé son retrait « définitif » de la vie politique du pays. Des affrontements ont alors opposé ces militants à l’armée et à des membres d’une faction chiite rivale. Des tirs d’armes automatiques et de roquettes ont également eu lieu dans la zone verte depuis hier. Une vingtaine de manifestants sont morts dans ces affrontements et plusieurs centaines ont été blessés, selon des sources citées par l’AFP et Al-Jazeera. Après l’appel de Moqtada al-Sadr au retrait de ses partisans, l’armée a levé le couvre-feu mis en place hier dans le pays.
Comment s’explique la crise politique dans le pays ?
L’Irak connaît une importante crise politique depuis les élections législatives d’octobre. Le parti chiite de Moqtada al-Sadr était devenu la première force politique, en remportant 73 sièges sur 329. Il a cherché à former une majorité avec des alliés sunnites et kurdes, rompant avec la traditionnelle alliance des partis chiites. En raison de l’opposition de l’autre pôle du chiisme politique à l’Assemblée, les députés ne sont pas parvenus à élire de président, première étape avant la formation d’un gouvernement. Le pays est depuis sans président et sans gouvernement. En juillet, les députés sadristes ont démissionné, laissant à leurs adversaires la responsabilité de former un gouvernement. Les militants sadristes ont commencé fin juillet à manifester en occupant les abords de l’Assemblée. Depuis, Moqtada al-Sadr appelle à la dissolution du Parlement et à de nouvelles élections. « Sadr a abandonné l’idée d’obtenir le monopole du pouvoir sur le camp chiite par le biais du processus électoral. Il a porté la bataille dans la rue », expliquait début août le chercheur Hamzeh Hadad au Monde.
Quelle est l’influence de Moqtada al-Sadr ?
Moqtada al-Sadr s’est « imposé comme l’un des plus importants dirigeants chiites du pays » depuis la chute du président Saddam Hussein en 2003, note sur son site le centre de réflexion américain Council on Foreign Relations. Ce religieux nationaliste avait dirigé une milice contre les forces américaines qui sont intervenues dans le pays à partir de 2003. Aujourd’hui, il cherche à « réformer le système politique à son avantage et prendre le contrôle de l’appareil d’État », expliquait début août le chercheur spécialiste de l’Irak Arthur Quesnay dans La Croix. Pour ce faire, Moqtada al-Sadr peut compter sur un important réseau civil militant. « Le mouvement sadriste reste populaire, car il a su capitaliser sur la colère populaire », expliquait début août le chercheur Hardy Mède sur RFI. Et pour convaincre les autres Irakiens, « il dit que c’est une bataille contre la corruption », abondait la chercheuse irako-américaine Marsin Alshamary également sur RFI.