Dans un entretien avec plusieurs médias publié dimanche dernier, Emmanuel Macron a estimé que « la pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes » sur le sujet de Taïwan en s’adaptant « au rythme américain » ou à la « surréaction chinoise ». La Chine revendique la souveraineté sur l’archipel de Taïwan. Emmanuel Macron rentrait d’une visite d’État en Chine, son premier déplacement dans le pays depuis 2019. Depuis bientôt 60 ans, les relations bilatérales entre les deux pays ont alterné entre des périodes de crise et de rapprochement.
Au sortir de la guerre civile chinoise (1927-1949), remportée par les communistes, Mao Zedong proclame la République populaire de Chine (RPC), tandis que les nationalistes du Kuomintang, défaits, se réfugient à Taïwan. Peu de pays reconnaissent initialement la RPC. La France est l’un des premiers pays occidentaux à le faire, en 1964. Le général de Gaulle justifie cette décision par le fait que « depuis 15 ans, la Chine presque toute entière est rassemblée sous un gouvernement qui lui applique sa loi et, qu’au-dehors, elle se manifeste comme une puissance souveraine et indépendante ». La reconnaissance de la RPC par la France ne permettra pas à cette dernière « de percer plus que ses concurrents sur le marché chinois », estime le chercheur Emmanuel Dubois de Prisque dans un article de 2019. Il précise que l’Allemagne et le Japon développent « plus vite et mieux que la France leur présence industrielle et commerciale sur place ».
En juin 1989, le régime communiste chinois réprime brutalement l’opposition étudiante rassemblée place Tiananmen, à Pékin. Plusieurs pays, dont les États-Unis et la France, participent dans les semaines qui suivent à l’opération « Yellow Bird », qui permet l’exfiltration d’opposants chinois – la France en accueille 150. Ces événements « glacent pendant plusieurs années les rapports franco-chinois », écrit le chercheur Jean-Pierre Cabestan dans un ouvrage de 2022. Les tensions entre les deux pays s’aggravent en 1991, lorsque la France vend à Taïwan des frégates non armées. Un communiqué du ministère français des Affaires étrangères a beau préciser qu’il s’agit « d’une affaire purement commerciale qui n’implique aucune relation officielle avec les autorités de Taïwan », cette vente « retarde jusqu’en 1994 toute amélioration des relations entre Paris et Pékin », souligne Jean-Pierre Cabestan. En janvier 1994, les gouvernements français et chinois publient un communiqué conjoint dans lequel ils conviennent de « restaurer leurs relations d’amitié et de coopération traditionnelles ». Le gouvernement français s’engage dans ce texte à ne plus vendre d’armements à Taïwan.
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